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RER métropolitain, oui mais…

L’association Métro de Bordeaux se prononce favorablement sur le principe d’un RER pour Bordeaux, mais émet plusieurs réserves.

Nous ne reviendrons pas sur la confusion des compétences, ni sur la répartition du financement qui nous semble être juridiquement fragiles, exposant ainsi les porteurs du projet à des recours.


1/ Les critères de la Métropole ne semblent pas s’appliquer ici…

La question de la rentabilité socioéconomique du RER est notamment éludée alors que la métropole s’est fixée pour objectif d’analyser chaque nouveau projet de mobilité selon trois critères :

· Utilité

· Rentabilité socioéconomique

· Bilan carbone

Aucune évaluation de ces trois critères ne nous permet d’apprécier le bien fondé du projet de RER Métropolitain. Bien que ces évaluations semblent prévues à court ou moyen terme, il est assez surprenant d’avoir à se prononcer sur ce projet sans ces données essentielles.

Il est important de rappeler qu’il s’agit d’un investissement conséquent (près de 680 millions d’euros en 2022 (et ce hors aménagements ferroviaires du sud de bordeaux dits AFSB) contre 233 millions d’euros au début du projet en 2018) pour un potentiel de voyageur projeté de 9250 voyageurs supplémentaires par rapport à un scénario au fil de l’eau, ce qui est notoirement faible au regard de l’investissement à réaliser.

Nous rappelons que le RER ne permettra pas à Bordeaux Métropole de faire l’économie d’un métro dans les années qui viennent comme cela a pu être énoncé dans la presse jusqu’à présent. Non, le RER ne sera pas notre métro.

Face aux diverses problématiques de mobilités de Bordeaux et de son aire urbaine (l’accès à la métropole pour les extra-métropolitains n’est pas le même sujet qu’une desserte efficace et plus fiable de l’intra-Métropole).

Métro et RER sont deux pièces complémentaires dans les réponses à apporter.

Il nous parait même inquiétant de faire le RER sans le métro, cela aura sans nul doute un impact sur le réseau de transports en commun de la Métropole. Celui-ci étant déjà sous pression voire saturé nous ne pouvons qu’être inquiets pour l’avenir si des décisions fortes ne sont pas prises.


2/ Les effets induits sur l’infrastructure de transports en commun de la Métropole

A l’arrivée sur Bordeaux, le RER se connecte à plusieurs gares (Pessac, Talence Médoquine, Cenon) dont la principale est la Gare Saint Jean et qui doit constituer le point d’entrée dans la ville. Mais cette gare est trop éloignée du centre-ville et souffre d’une desserte déjà peu efficace en transport en commun pour rejoindre les autres pôles du centre-ville (Mériadeck, Victoire, Gambetta, CHU, etc). La desserte sera encore plus insuffisante demain (sans métro) pour absorber de nouveaux flux de voyageurs alors que la fréquentation de Saint-Jean atteint déjà les 18 millions de voyageurs par an.

Pour exemple : Strasbourg anticipe 30 à 40% d’usagers supplémentaires dans sa gare principale à la mise en fonction du RER, qu’en sera t-il de la gare Saint-Jean de Bordeaux ? Notre gare principale est aujourd’hui mal desservie et ce n’est pas un bus express qui changera la donne…

Le RER peut constituer une pièce de puzzle face aux embouteillages routiers, et à la mauvaise desserte par les transports en commun des communes périurbaines.

Un mix RER/métro permettrait davantage d’atteindre l’objectif de diminuer l’attractivité de la voiture dans le périurbain. Le métro permettrait de rejoindre rapidement les centralités d’emplois et commerciales de la métropole (Mériadeck, centre-ville) depuis le RER, résolvant ainsi une partie du problème du « dernier kilomètre » que le RER seul est incapable de résoudre.

L’un des atouts vantés du RER métropolitain est la diamétralisation, mettant ainsi de l’importance sur les gares de Cenon et de la Médoquine. La gare de la Médoquine pourrait jouer un rôle pour aider à la desserte du campus et à désaturer la ligne B du tramway. Il serait pertinent d’étudier l’effet de la gare talençaise (associée au bus Express Pellegrin-Malartic) sur les flux allant vers le campus. Aussi, afin d’améliorer la desserte du campus depuis le cadran Nord-Ouest de la métropole, il serait pertinent d’étudier le remplacement le service TER médoc/Pessac Centre par un service Médoc/Médoquine.


3/ Des effets pervers sur l’urbanisme

La rentabilité socio-économique est cependant rendue complexe par la morphologie urbaine de Bordeaux. Caractérisée par un étalement urbain important, constituée par un habitat pavillonnaire peu dense et dispersé et par de grandes zones d’activités suivant le même schéma, celui-ci rend peu efficace la desserte de ces zones par un RER aux lignes droites.

Ce phénomène rend les gains de temps engendrés par le RER très théoriques car de nombreuses ruptures de charge sont à prévoir pour les usagers (prendre sa voiture pour aller à la gare de départ, tourner pour trouver une place et se garer, attendre l’heure du train (cadencé au départ toutes les 30 mn), faire le trajet, arriver à la gare de départ pour reprendre ensuite le réseau TBM afin de rejoindre sa destination finale alors que ce dernier souffre de sa saturation, de ses pannes et de sa lenteur qui le rendent peu compétitifs, tant pour les impératifs de la vie quotidienne que pour accueillir confortablement, les futurs usagers du RER.

Cette problématique de l’urbanisme n’est pas abordée à l’occasion de ce projet de RER alors que c’est la plus importante de toutes. Ainsi, en raison de ce problème de morphologie urbaine, et de part l’insuffisance de l’infrastructure de transport dans la Métropole, le RER ne peut capter qu’un nombre réduit d’usagers potentiels et sa rentabilité ne peut être garantie. Avec un potentiel de voyageurs aussi faible et face aux 85000 à 140000 véhicules qui empruntent la rocade chaque jour, le RER seul aura bien du mal à attirer.

Il est à noter que le RER, s’il atteint un jour son rythme de croisière, peut aussi inciter les personnes à vivre plus loin de la métropole et, sans régulation volontariste, continuera à alimenter l’étalement urbain ainsi que l’artificialisation des sols.

C’est l’un des effets pervers que l’on peut hélas craindre et que le projet ici présenté ne questionne pas, nous le regrettons.


Conclusion

En conséquence, l’association Métro de Bordeaux formule les recommandations suivantes :

· Le RER doit s’accompagner d’une vraie réflexion sur la régulation de l’urbanisme des zones traversées

· Le RER doit être complété par un métro pour relier efficacement les principaux pôles de l’agglomération (Campus, CHU, centre-ville, Gare Saint-Jean, Rive Droite), l’option métro rendant possible le désengorgement de Saint-Jean en amont via une desserte de la Médoquine et de Cenon Gare

C’est cette complémentarité avec le métro qui sera vecteur d’attractivité pour le RER, lui permettant d’attirer bien plus que les 9250 voyageurs aujourd’hui projetés, permettre un report modal plus important vers des mobilités décarbonées et répondre ainsi à l’impératif climatique.


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